Pénurie de talents : comment mesurer le ROI des RH face aux difficultés de recrutement ?

Robinet fermé : symbole de la pénurie de candidats qui touche les recruteurs de plus en plus fort, d'où la nécessité de mesurer le ROI des actions RH

Le contexte actuel est celui d’une pénurie de talents sur le marché du travail. Les entreprises ont manifestement tout intérêt à investir dans les ressources humaines, pour favoriser le recrutement et la fidélisation de leurs meilleurs éléments. Il est cependant important d’évaluer le rapport entre le coût et les bénéfices de ces actions en ressources humaines afin de prouver leur rentabilité. Comment mesurer le ROI en RH en fonction du contexte actuel du marché du travail ?

La pénurie de talents, défi des RH en 2023

On parle de “pénurie de talents” pour désigner la difficulté, pour les entreprises et notamment le service RH, d’attirer les meilleurs candidats, mais aussi de retenir les meilleurs profils. Ce concept n’est pas récent : plusieurs fois au cours de l’histoire, on a pu observer ce déséquilibre entre l’offre et la demande d’emploi.

Les pénuries de talents surviennent lorsqu’un domaine manque de travailleurs qualifiés. Les pénuries de candidats réduisent la productivité d’une entreprise et augmentent les coûts. COVID-19, pénurie de talents, grande démission, génération Z… Ces sujets dominent l’actualité, signaux d’un marché du travail tendu.

Pour illustrer ce chaos ambiant, le Microsoft’s Work Trend Index 2021 indiquait que 41 % des employés dans le monde envisageaient de démissionner dans l’année. Par ailleurs, de nombreuses industries ont été touchées par le manque de travailleurs, de la Chine à l’Allemagne en passant par les États-Unis, où 4,3 millions de personnes ont quitté leur emploi au cours du seul mois d’août.

La pénurie de talents observée actuellement est à la rencontre de plusieurs phénomènes

D’abord, la croissance économique et l’essor des nouvelles technologies conduisent à la création de nouveaux emplois, ce qui crée un déséquilibre entre l’offre et la demande. Dans certains secteurs, on observe une forte concurrence entre les entreprises pour attirer les meilleurs talents.

Les causes de la pénurie de talents sont aussi démographiques : on observe un vieillissement de la population et une baisse de la natalité. Les baby-boomers partent à la retraite et les millenials – fameuse “génération Y” née entre 1980 et la fin des années 90 – les remplacent sur le marché du travail, bien moins nombreux.

Les compétences des profils sur le marché du travail ne sont tout simplement pas à jour face à cette mutation de l’emploi !

Les talents se font aussi de plus en plus rares : la révolution numérique a bouleversé les habitudes de consommation et les programmes d’enseignement ne sont plus adaptés. Les qualifications requises par les RH ne sont pas toujours disponibles. Or, les emplois peu qualifiés et routiniers sont de plus en plus automatisés, tandis que des emplois à forte qualification se créent. Les compétences des profils sur le marché du travail ne sont tout simplement pas à jour face à cette mutation de l’emploi ! Prenons l’exemple du métier d’ingénieur : il y a de plus en plus de demande pour des compétences de pointe comme l’intelligence artificielle ou le nucléaire, mais les ingénieurs restent majoritairement formés à des domaines comme le génie industriel, le génie mécanique ou encore le génie architectural.

Cette tension sur le marché du travail conduit à une évolution préoccupante des comportements et motivations des candidats. Une étude LinkedIn portant sur des milliards de données provenant de plus de 880 millions de membres actuels de la plateforme et de plus de 200 pays illustre parfaitement ce changement d’état d’esprit. L’analyse révèle une évolution spectaculaire de l’utilisation de certains mots-clés sur la plateforme, dont notamment :

  • “Flexibilité au travail » (+362 %)
  • « Bien-être » (+35 %)
  • « Culture d’entreprise » (+15 %).

Les chiffres alarmants derrière la pénurie de talents

Une enquête du CPME révèle que 31 % des travailleurs ont refusé une offre d’emploi à temps plein après avoir terminé un contrat temporaire. Preuve que les travailleurs deviennent plus sélectifs en matière d’emploi. En effet, 79 % des entreprises font état d’un manque de candidats, 69 % de profils inadéquats et 59 % d’attentes inappropriées de la part des candidats. On peut aussi en déduire que les candidats ne recherchent plus la stabilité de l’emploi, mais une certaine flexibilité.

Tous les secteurs d’activité et métiers semblent touchés. Pierre Verzat, Président de Syntec-Ingénierie, prend l’exemple des entreprises d’ingénierie, particulièrement des domaines du nucléaire et de la tech, qui souffrent d’un déficit de talents évident. En effet, la France recrute 80 000 nouveaux ingénieurs diplômés par an. Or, nos écoles n’en forment que 40 000.

Même constat dans le secteur de l’informatique : d’après Numeum, syndicat des entreprises de l’informatique, il manquerait 10 000 diplômés par an.

Par ailleurs, une étude de l’UIMM révèle que l’industrie au sens large devra procéder à 225 000 recrutements par an d’ici à 2025. Ce chiffre inclut tous les secteurs et pas seulement la métallurgie (qui devra procéder à 110 000 recrutements !)

Les syndicats sont les premiers à identifier les pénuries de talents sur le terrain. Que se cache-t-il derrière ces chiffres ?

Comment mesurer l’efficacité des RH face à la pénurie de talents ?

Même si 79 % des RH déclarent que leurs dirigeants saisissent l’importance d’une gestion optimale de leurs talent, les RH éprouvent des difficultés à montrer qu’elles créent de la valeur ajoutée pour l’entreprise : bien souvent, aucun indicateur n’est mis en place dans les entreprises.

Quel ROI pour les RH et le recrutement ?

L’efficacité d’un recrutement peut être évaluée en calculant son ROI –Retour sur investissement –, et en le comparant à d’autres investissements.

Mettre en avant le ROI des recrutements consiste d’une part à mesurer leurs coûts induits : salaires des recruteurs, temps consacré, salaire d’un candidat embauché, outils, etc. Il y a aussi des coûts indirects, comme le temps consacré à l’onboarding des nouveaux arrivants ou les coûts administratifs liés au recrutement. Pour évaluer ce ROI, il faut rapporter ces coûts au bénéfice et en déduire la plu value. On connaît plutôt bien le coût d’un recrutement raté.

Le coût d’un recrutement raté serait de 151 700 € pour un dirigeant d’entreprise !

Dans l’ouvrage Recrutement : un enjeu business, Hervé Solus et Chantal Engel estiment que le coût d’un recrutement raté varie entre 20 000 € et 200 000 €, selon les études et le poste occupé. Une étude ManPower, HR Voice et Open sourcing a estimé ce coût entre 30 000 € et 150 000 €. Plus le poste est important, plus le coût augmente : il serait de 32 500 € en moyenne pour un technicien, de 51 850 € en moyenne pour un cadre et de 151 700 € pour un dirigeant d’entreprise !

Par recrutement raté, on entend le recrutement d’un candidat qui finira par quitter très rapidement l’entreprise, qu’il s’agisse de sa décision ou de celle de l’entreprise. En effet, plus d’un tiers des CDI sont rompus avant leur date anniversaire ! Et encore, ces chiffres ne comptent pas les recrutements qui ne peuvent pas entrer dans la catégorie du “recrutement raté”, mais qui ne donnent toutefois pas entière satisfaction à l’entreprise.

Un recrutement réussi rapporte beaucoup plus qu’il n’en coûte à l’entreprise. Le ROI d’un recrutement se mesure sur une longue temporalité, car il faut attendre que le nouvel employé ait gravi la courbe d’apprentissage et que les coûts initiaux – notamment de formation – aient été amortis. Dans le cas d’un recrutement raté, où le candidat quitte l’entreprise à la fin de sa période d’essai, ces coûts n’ont pas eu le temps d’être amortis : c’est pour cela qu’un recrutement raté coûte autant à une entreprise.

Quels KPI pour suivre le succès des actions RH ?

Le tableau de bord ne doit pas être une usine à gaz : il doit contenir quelques indicateurs seulement, et uniquement ceux qui sont réellement utiles à la mesure du ROI des RH. Ces KPI doivent être choisis pour leur lisibilité et la facilité à les mesurer et à les suivre. 

Voici quelques exemples pour le recrutement :

  • Le taux de clics sur les publicités d’emploi et/ou le nombre d’entretiens réalisés : intérêt des candidats pour le recrutement, pertinence et efficacité des actions de recrutement.
  • Le taux de conversion (candidatures/clics) : engagement des candidats.
  • Le délai de recrutement : temps qu’il faut pour pourvoir un poste. Un faible délai de recrutement peut indiquer que les processus de recrutement et de sélection de l’entreprise attirent efficacement les talents.
  • Le coût par candidature : somme investie sur chaque canal marketing, et comment maximiser les performances de vos actions.

Et pour la rétention :

  • Le taux de rétention des employés (et à l’inverse, de turnover) : pourcentage d’employés qui restent dans l’entreprise, qui sont donc probablement satisfaits.
  • L’engagement des employés : implication, engagement et enthousiasme des employés pour leur travail. Un engagement élevé des employés peut indiquer que la politique RH en faveur de critères, comme la formation et le développement, crée un environnement de travail positif et favorable.
  • La satisfaction des employés : à l’égard du travail, des collègues et de l’entreprise. Compétences des équipes, autonomie sur le poste, rémunération et cadre de travail répondant ou non aux besoins et aux attentes des employés.
  • Diversité et inclusion : dans quelle mesure la main-d’œuvre de l’organisation reflète sa clientèle. Les pratiques en matière de ressources humaines, telles que le recrutement et la rétention, peuvent attirer et retenir une main-d’œuvre diversifiée.

La marque employeur : voie royale pour optimiser le ROI des recrutements

Une étude de LinkedIn a révélé que 40 % des candidats positionnent en priorité la culture de l’entreprise –  et donc la marque employeur – comme élément déterminant de leur choix.

Les entreprises qui veulent recruter plus rapidement ont besoin d’une marque employeur forte. Recruteurs et Responsables RH s’accordent à dire qu’une image employeur solide aide à recruter des candidats pénuriques et des travailleurs des générations Y et Z.

Une marque employeur forte réduit le turnover de 28%, et le coût par embauche de 50% !

La marque employeur est l’un des chantiers les plus importants pour agir sur le développement commercial de l’entreprise à court, moyen et long terme. En effet, en 2022 LinkedIn a publié quelques chiffres intéressants. D’après ses analyses, une marque employeur forte réduit le turnover d’employé de 28 %, ce qui permet de limiter le nombre de recrutements ratés. Mais ce n’est pas tout : une marque employeur forte réduit aussi le coût par embauche de 50 % ; de quoi booster considérablement le ROI des RH !

Le marketing RH est la discipline qui aide à attirer et retenir les talents en créant toutes les conditions favorables à une marque employeur consistante. Elle promeut une image positive de l’entreprise et affecte positivement les candidatures spontanées ; très bon indicateur de performance pour le ROI des RH. Cette démarche est salvatrice, non seulement pour établir un diagnostic mêlant KPI quantitatifs et qualitatifs, des préconisations et un plan d’action, et donc pour faire évoluer une marque employeur de l’intérieur ; mais aussi pour véhiculer cette marque employeur en interne et fidéliser les salariés, ou en externe pour attirer de nouveaux talents.

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