Tour du monde des RH : le Canada avec Desjardins

Stéphane Pelletier Desjardins

Nous continuons notre tour du monde de la planète RH. Après Leroy Merlin et l’Ukraine, nous découvrons le Canada avec Desjardins, le premier groupe financier coopératif au pays fondé en 1900. Il est régulièrement cité comme une des entreprises les plus citoyennes, et un des employeurs les plus attractifs du Canada avec plus de 45 000 employés. Stéphane Pelletier, VP Acquisition et gestion de talents de Desjardins, que j’avais rencontré il y a quelques mois à Montréal pour parler Marketing RH, nous sert de guide pour cette escale.

Bonjour Stéphane, pouvez-vous nous dire quelques mots sur vous ?
Je suis dans les RH depuis plus de 25 ans. J’ai eu l’occasion de travailler dans tous les domaines liés aux RH : acquisition de talents, rémunération, organisation, gestion des compétences, développement organisationnel,… Avant Desjardins, j’ai œuvré 10 ans chez Bombardier Aéronautique dans divers rôles et dernièrement responsable de l’acquisition des talents. J’ai fait le saut vers Desjardins plus tôt en 2014. Desjardins est à la fois un groupe coopératif et un groupe financier. En tant que VP RH, je dois prendre en compte cette dimension particulière : des impératifs de rentabilité bien sûr, mais une mission sociale, une responsabilité qui est inscrite dans l’histoire de ce groupe, à la fois vis-à-vis des collaborateurs, mais plus largement de la société civile, avec un fort ancrage local. Nous sommes la seule institution financière présente dans plus de 450 villes et villages du Québec. Nous y jouons un rôle social fort tant comme employeur que citoyen corporatif : nous attachons par exemple une grande importance à maintenir notre présence dans les régions difficiles en termes d’emploi.

Immeuble DesjardinsComment êtes-vous organisés ? Quels sont vos principaux enjeux ?
L’acquisition et la gestion de talents est organisée en 3 équipes : deux centres d’expertise de 15 personnes, responsables de la vigie stratégique et de la conformité, pour nous aider à comprendre les best practices, les nouvelles tendances, les évolutions émergentes et le contexte législatif, tant en acquisition de talent qu’en gestion du talent pour que nous soyons encore dans 5 ans un employeur de choix. L’expérience que vit l’employé de Desjardins a été structurée autour de “moments de vérité”, des moments essentiels dans le cycle de vie professionnelle pour lesquels nous devons tenir notre promesse en tant qu’employeur, de l’embauche jusqu’à la planification de retraite en passant par la gestion de la carrière. C’est en travaillant sur ces moments que nous maintenons la motivation, l’engagement, le bien-être. Enfin la troisième équipe, la plus conséquente avec 120 collaborateurs, veille à assurer le recrutement, à simplifier les process dans un seul objectif : améliorer et simplifier l’expérience candidat, fluidifier son parcours.
Le principal enjeu est de nous adapter aux nouvelles attentes des candidats et collaborateurs, et notamment des plus jeunes. Il y a encore quelques années, ils construisaient leur carrière avec une logique linéaire, basée sur une progression régulière, avec des promotions successives. Aujourd’hui, ils veulent être stimulés, ils recherchent la multiplication des expériences, sont attirés par les autres pays. L’entreprise doit satisfaire leur curiosité, répondre à cette nouvelle forme d’exigence.

Quel est le principal sujet d’attention pour les RH au Canada ?
Le principal problème du pays est celui de l’adéquation de compétences. Le Canada est en mutation : il passe d’une économie de production, à une économie tertiaire, dans laquelle l’innovation est indispensable. Le Canada, à l’instar d’autres pays industrialisés, a longtemps vécu dans une forme d’autarcie plutôt confortable. Mais l’économie mondialisée nous oblige à nous remettre en cause. Nous ne pouvons pas être compétitifs sur la base de la qualité ou sur les coûts. Les fleurons actuels de l’économie canadienne de dimension internationale tel que le Cirque du Soleil, ont énormément misé sur l’innovation. Notre taux de chômage, de l’ordre de 7%, parait très faible par rapport à la France ou à l’Europe du Sud. Du coup, les entreprises se battent pour attirer les mêmes talents. Tout l’enjeu est de requalifier ces 7% pour qu’ils répondent aux besoins changeants des entreprises. Desjardins fait partie de “Finance Montréal”, un regroupement d’acteurs clés de l’industrie qui travaillent ensemble pour adapter les programmes universitaires en fonction des besoins des entreprises, par exemple sur la cyber-sécurité ou la gestion des risques. Ces fonctions deviennent stratégiques pour une entreprise financière, mais elles manquent cruellement de compétences.

drapeau CanadaQue signifie l’engagement ? Quelle est la nature des rapports entre les collaborateurs et l’entreprise ? Quelle forme prend le dialogue social ?
Je crois que globalement, les salariés sont plutôt engagés dans leur entreprise. Ils sont prêts à accepter les changements, car le sentiment de contribuer à la vie, à la réussite de l’entreprise est très important ici. Les échelles des salaires ne connaissent pas de disparités trop importantes, et notre pays dispose d’un bon éventail de mesures sociales. Nous sommes dans un modèle qui se situe à mi-chemin entre l’Europe et les USA. Les discussions entre les collaborateurs et la direction se font en partenariat, l’environnement est peu conflictuel. Il y a beaucoup d’échanges avec les syndicats, qui ont une vraie culture “business”. Ils sont considérés, et se considèrent eux-mêmes vraiment comme des partenaires de l’entreprise. Au Canada, 50 % des salariés appartiennent à un syndicat. Je crois que cette forte représentativité joue sur la forme du dialogue social et la posture des syndicats.

Quelle est la maturité des entreprises sur le sujet de la Marque Employeur ?
C’est un sujet qui est traité de façon inégale par les entreprises, malgré cette concurrence sur les compétences que j’évoquais. Dans bien des cas, la Marque Employeur est considérée comme une simple résultante du travail sur le contrat social et la promesse en tant qu’employeur. Elle est plutôt perçue comme une résultante, sa réputation en fait. Mais les entreprises commencent à travailler ce sujet, notamment en raison de la pression des nouveaux candidats qui sont très attachés à la responsabilité sociale des entreprises.

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